Les Français du Liban ont massivement voté pour Fillon lors de la présidentielle

Comme journaliste politique de longue date, je me suis penché sur un phénomène électoral qui mérite analyse : le vote des Français expatriés, particulièrement au Liban, lors du premier tour de l’élection présidentielle de 2017. J’ai toujours considéré que ces scrutins hors de l’hexagone constituent un thermomètre particulier de notre vie démocratique, souvent négligé dans les analyses médiatiques conventionnelles.

Une mobilisation record des Français du Liban pour François Fillon

Les résultats du premier tour de la présidentielle 2017 au Liban révèlent une tendance sans équivoque : les Français établis dans ce pays du Moyen-Orient ont massivement plébiscité François Fillon. Le candidat des Républicains a donc recueilli 60,13% des suffrages exprimés dans ce pays, soit un score trois fois supérieur à sa moyenne nationale. Cette performance exceptionnelle mérite d’être contextualisée pour en comprendre les ressorts profonds.

La participation au sein de la communauté française du Liban s’est révélée particulièrement élevée, atteignant 45,42% des inscrits. Ce taux, significativement supérieur à celui observé dans d’autres pays de la région, témoigne d’une mobilisation citoyenne remarquable. Après dépouillement des 19 329 votes exprimés, François Fillon a obtenu 11 632 voix, distançant très largement ses principaux concurrents. Emmanuel Macron, pourtant vainqueur au niveau national, n’a recueilli que 4 854 voix (25,11%), suivi de Jean-Luc Mélenchon avec 1 602 voix (8,29%).

Les liens historiques entre la France et le Liban expliquent en partie cette mobilisation. Ancienne puissance mandataire, la France entretient avec le « pays du Cèdre » une relation privilégiée, renforcée par des échanges culturels, économiques et diplomatiques constants. La communauté française expatriée, estimée à environ 21 000 personnes inscrites au registre consulaire, présente par ailleurs des caractéristiques sociologiques spécifiques qui peuvent éclairer ce vote massif en faveur du candidat de la droite traditionnelle.

Les facteurs explicatifs d’un vote conservateur prononcé

Pour comprendre l’ampleur du soutien à François Fillon parmi les Français du Liban, j’ai analysé plusieurs facteurs déterminants. Tout d’abord, la structure socioprofessionnelle de cette communauté expatriée joue un rôle prépondérant. Composée en grande partie de cadres supérieurs, d’entrepreneurs et de professions libérales, elle présente un profil globalement favorable aux propositions économiques libérales portées par le candidat Républicain. Son programme de réduction des dépenses publiques et d’allègement fiscal a manifestement trouvé un écho favorable auprès de cette population.

Un deuxième facteur explicatif réside dans la sensibilité particulière des Français du Liban aux questions géopolitiques régionales. La position de François Fillon sur le Moyen-Orient, perçue comme plus ferme et moins ambiguë que celle d’autres candidats, a vraisemblablement pesé dans les choix électoraux. Sa connaissance des dossiers internationaux et sa vision diplomatique ont rassuré une communauté particulièrement exposée aux turbulences régionales.

Les affinités confessionnelles constituent également un élément d’analyse pertinent. La communauté française au Liban compte une proportion significative de chrétiens d’Orient ou de personnes sensibles à leur sort. La défense des chrétiens d’Orient, sujet régulièrement évoqué par François Fillon durant sa campagne, a certainement consolidé son capital de sympathie auprès de cet électorat. Sans tomber dans un déterminisme religieux simpliste, je constate que les valeurs conservatrices et l’attachement à certaines traditions ont pu favoriser le candidat de la droite traditionnelle.

Enfin, le rejet d’alternatives politiques perçues comme risquées a joué en faveur de Fillon. Face à Emmanuel Macron, alors considéré comme inexpérimenté, ou aux candidats plus radicaux comme Jean-Luc Mélenchon ou Marine Le Pen, François Fillon incarnait pour beaucoup une forme de stabilité institutionnelle rassurante.

Un vote différent du territoire national qui interroge

Le contraste saisissant entre le vote des Français du Liban et celui de l’Hexagone soulève des questions fondamentales sur les dynamiques électorales des communautés expatriées. Avec 60,13% des suffrages pour Fillon contre seulement 20,01% au niveau national, l’écart de 40 points pourcentage témoigne d’une perception radicalement différente des enjeux politiques.

Cette divergence n’est pas anodine et mériterait d’être davantage intégrée dans l’analyse politique générale. J’ai souvent observé que les votes des Français de l’étranger révèlent des tendances particulières qui peuvent annoncer des évolutions futures ou mettre en lumière des préoccupations spécifiques. Dans le cas du Liban, ce vote massif en faveur de François Fillon reflète probablement une vision politique plus conservatrice et attachée à certaines valeurs traditionnelles que celle qui prévaut aujourd’hui en France métropolitaine.

Les résultats ultérieurs du second tour, avec une victoire d’Emmanuel Macron également dans cette circonscription mais avec un score moins écrasant qu’ailleurs, confirment cette particularité. Si les Français du Liban ont finalement accordé 56,33% de leurs suffrages au futur président contre 43,67% pour Marine Le Pen, ce score reste l’un des plus serrés parmi les communautés françaises à l’étranger.

Pour les prochaines échéances électorales, cette spécificité libanaise constituera un indicateur intéressant à surveiller. Elle témoigne de la diversité des sensibilités politiques au sein de la communauté française mondiale et rappelle que l’expatriation façonne souvent un rapport particulier aux enjeux nationaux.

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