J’ai appris avec émotion le décès du colonel Jean Luciani, survenu le 10 août 2021. Figure emblématique à la double carrière exceptionnelle, ce résistant devenu officier de la Légion Étrangère s’est illustré sur les champs de bataille d’Indochine avant de se consacrer à la vie politique corse. Grand Croix de la Légion d’Honneur, ce héros militaire a poursuivi son engagement au service des citoyens comme maire de la commune de Moncale pendant vingt ans. Après avoir quitté l’uniforme, il avait également occupé d’importantes fonctions au sein du conseil départemental, démontrant un dévouement sans faille envers son territoire.
Un parcours d’engagement au service de la France et de la Corse
Une brillante carrière militaire marquée par l’héroïsme
Né à Lyon en 1926, Jean Luciani s’engage très jeune dans la Résistance durant la Seconde Guerre mondiale. Son parcours militaire débute véritablement en 1946 à Coëtquidan, au sein de la promotion « Indochine ». Les terrains d’opérations asiatiques deviendront le théâtre de ses plus grands faits d’armes. Lieutenant puis capitaine dans la Légion, il effectue deux séjours en Indochine qui marqueront profondément sa carrière.
C’est au 1er Bataillon Étranger de Parachutistes (BEP) que Luciani forge sa légende. Son courage lors de la « bataille des 5 collines », du 30 mars au 4 avril 1954, lui vaut d’être nommé capitaine « au feu » – distinction rare réservée aux actes de bravoure exceptionnels. Blessé quatre fois durant la bataille de Dien Bien Phu, il incarne la résistance française face à l’adversité. Après l’Indochine, il poursuit son service en Algérie au sein de la 11ème demi-brigade de choc jusqu’en 1968.
Son impressionnant palmarès militaire comprend :
- La Grand Croix de la Légion d’Honneur
- Le titre de Commandeur de l’Ordre National du Mérite
Avec dix citations et quatorze titres de guerre, Luciani s’impose comme une figure légendaire des parachutistes de la Légion, admiré pour son leadership et son abnégation.
De l’armée à la vie civile et politique
Après avoir quitté l’uniforme en 1968, Jean Luciani se lance dans l’entreprenariat, créant sa propre entreprise. Cette transition vers le secteur privé lui permet de développer de nouvelles compétences qui se révèleront précieuses pour sa carrière politique ultérieure. Son sens des responsabilités et sa capacité à mener des projets le conduisent naturellement vers les affaires publiques.
Élu régional dans les années 80 et 90, il gravit progressivement les échelons de la vie politique locale. C’est en 2001 qu’il devient maire du village de Moncale, fonction qu’il exercera avec passion pendant vingt ans. Comme il le confiait lui-même, ce n’était pas l’attrait du pouvoir qui l’avait conduit à cette candidature, mais bien l’amour sincère pour sa commune et ses habitants.
Au fil des années, son expertise et son dévouement lui ouvrent les portes du conseil départemental dont il assurera la présidence avec la même rigueur que celle qui caractérisait son commandement militaire. Chaque projet communal bénéficie de son expérience de terrain et de sa connaissance approfondie des dossiers.
Un engagement associatif et mémoriel constant
Parallèlement à ses mandats politiques, Jean Luciani s’investit activement dans la préservation de la mémoire combattante. Secrétaire national de l’Association Nationale des anciens prisonniers internés déportés d’Indochine (ANAPI), il reste également un fidèle de l’AALP (Association des Amis de la Légion Étrangère).
Sa contribution au devoir de mémoire se concrétise notamment par :
- Sa participation à un ouvrage de témoignages avec Philippe de Maleissye
- Son action permanente pour entretenir le souvenir des sacrifices consentis en Indochine
Reconnu pour son engagement, son courage, mais aussi son humour et sa modestie, cet ancien officier inspirait respect et affection bien au-delà des cercles militaires.
Les hommages rendus lors de son décès
Le mercredi 18 août 2021, les Invalides ont accueilli les obsèques du colonel Luciani. Les honneurs militaires lui ont été rendus dans la prestigieuse cour d’honneur, témoignage de la reconnaissance de la Nation envers ce serviteur exemplaire. L’éloge funèbre prononcé par le CGA Philippe de Maleissye a rappelé le parcours exceptionnel de cet homme qui, jusqu’à ses derniers jours, avait œuvré pour sa commune.
Peu avant son décès, il avait transmis son écharpe de maire à Jean-Baptiste Filippi, ne pouvant achever son quatrième mandat à la tête de Moncale. Son départ a suscité une vive émotion, non seulement dans son village mais dans l’ensemble de la famille politique corse et nationale.
Analyste politique rigoureux, Thomas décrypte les mécanismes du pouvoir et les décisions publiques avec clarté et esprit critique. Son credo : rendre lisible ce qui est volontairement complexe. Amateur de romans noirs et de débats de fond.